poussière du nickel : pollution maximale

Les poussières retombent à des kilomètres à la ronde
Trois chercheurs de l’Institut de recherche et développement ont modélisé les panaches des fumées industrielles. Cet outil leur permet de voir jusqu’où les poussières de Doniambo et de Prony peuvent se poser et donc avoir un impact sur notre environnement. Selon leurs premiers résultats, les poussières de Prony viennent jusqu’à Nouméa et touchent tout le Sud. Celles de Doniambo s’étendent sur des dizaines de kilomètres.

Tout a commencé alors qu’un chercheur de l’IRD effectuait des mesures sur l’activité bactérienne dans le lagon calédonien. Au cours de ce programme d’observation il a tout simplement relevé un taux anormalement important de particules dans l’eau. Ces dernières provoquant une activité bactérienne et le développement d’une flore toute particulière. Le scientifique a donc passé le relais à trois chercheurs océanographes de l’Institut de recherche pour le développement afin de comprendre ce qu’étaient ces particules et surtout d’où elles provenaient.
Patrick Marchesiello, Jérôme Lefevre et Christophe Menkes ont donc utilisé un modèle de traceurs des panaches de fumée de la centrale au fuel de Doniambo et de la centrale de Prony énergies. Le but était de comprendre le parcours des poussières rejetées et donc leur impact sur notre environnement. « Nous nous sommes attachés à étudier le black carbone (apparenté à de la suie, le black carbone est obtenu à partir des résidus issus de la combustion incomplète d’énergie fossile, de bois de charbon et plus généralement de la biomasse), dont on connaît l’importance de l’impact sur la santé et le réchauffement climatique », explique Christophe Menkes.
Les chercheurs se sont donc appuyés sur les mesures de Scal-Air pour calibrer leur modèle (une simulation très proche de la réalité) qui apporte un plus puisqu’il permet une spatialisation à grande échelle. « Le problème réside dans le fait qu’il est difficile d’obtenir les quantités émises par les industriels, mais ce que nous cherchons avant tout dans le développement de cette activité de recherche c’est la compréhension du processus dans l’atmosphère et dans le lagon ainsi qu’un lien vers la santé », précise Jérôme Lefèvre.

« La nuit, les polluants stagnent et donc le dépôt est maximal à proximité de la source »

Cette modélisation montre donc l’étendue du dépôt au sol des aérosols émis par la centrale thermique de Doniambo et par celle de Prony « le tout exprimé en milligrammes par kilos émis, puisque les quantités ne sont pas connues ».
Ce que cette étude montre est assez impressionnant : les poussières de Prony viennent jusqu’à Nouméa et touchent tout le Sud. Celles de Doniambo s’étendent sur des dizaines de kilomètres au gré des vents, vont bien au-delà de la barrière de corail à l’ouest et arrosent également une bonne partie de la côte Est.
« Ce que l’on constate c’est qu’il ne se passe pas la même chose la nuit et le jour. La nuit, les polluants stagnent et donc le dépôt est maximal à proximité de la source. Ça, c’est un élément important pour Nouméa, avancent les chercheurs de l’IRD. Désormais nous savons où vont les fumées, les particules. C’est pourquoi nous aimerions avoir accès aux quantités précises qui sont rejetées pour pouvoir faire des estimations de concentrations réelles. Il y a peut-être un peu de pression à faire sur les industriels. »

Ludovic Lafon

Black carbone : un laboratoire calédonien
Les chercheurs prévoient de soumettre un projet de recherche l’année prochaine à l’ANR (Agence nationale de la recherche) pour étudier plus précisément les rejets de black carbone dans l’atmosphère et l’impact dans notre lagon. « Ce qui serait intéressant c’est également de voir l’impact sur les pluies acides qui pourraient avoir des répercussions sur nos espèces endémiques », expliquent les chercheurs qui veulent constituer de nouveaux thèmes de recherche. La Nouvelle-Calédonie pourrait donc faire partie, avec le Vietnam et Villefranche-sur-Mer en Métropole, de sites d’étude pour l’ANR. A suivre…

Les trois chercheurs s’attachent à comprendre le processus des rejets dans l’atmosphère et dans le lagon pour voir s’il y a un impact sur la santé. - Photo archives
Les Nouvelles Calédoniennes 5/9/2009